Dès notre arrivée à El Chalten, nous regardons la météo. Nous le savons, ici il faut savoir profiter des (rares) fenêtres que Zeus est susceptible de nous offrir. La carte nous propose de relier les deux randos que nous voulions faire pour en faire une grande. Sauf que la liaison entre les deux n’est autorisée que dans un seul sens, et bien évidemment pas celui que nous voulions. Ce sera donc deux randos que nous ferons. La météo dicte l’ordre. Nous partons pour le Fitz Roy et le Cerro Torre, ou plus précisément pour le point de vue sur le Fitz Roy et le Cerro Torre, restons humbles… Départ tardif pour monter au camping le plus proche du fameux Mont. Nous sommes les derniers, ou presque, à arriver au milieu de dizaines de tentes. Pendant que nous plantons la nôtre, Leïla et Célestin se lancent dans les grands travaux : construction de table, chaises, bancs et circuit pour courir.
Nous, nous couchons sous un ciel étoilé… pour nous réveiller sous le même ciel étoilé. Petite côtelette nocturne pour arriver en même temps que les premières lumières sur le Fitz Roy. Pas de rose, les nuages dans la plaine empêchant les rayons du soleil de venir réchauffer le rocher. Ça n’en reste pas moins magique !
Ensuite, redescente, suivie d’une traversée pour aller camper au plus près du Cerro Torre cette fois. Nouveau réveil matinal pour lever de soleil à cinq minutes de la tente. Nous avons la chance de pouvoir prendre notre petit déjeuner baignés par une belle lumière orangée face à la montagne préférée de Florent !
Puis c’est la descente finale pour une arrivée dans le vent d’El Chalten ! Nous changeons de rue pour ne pas nous faire fouetter par le sable. Carnage au camping, un paquet de tentes sont complètement en vrac. A nous de trouver une place relativement abritée au milieu de tout ce quilombo…
Deux jours de repos pour laisser passer le vent et la pluie, pour faire la classe et manger des glaces, pour profiter de la salle commune, bondée, du camping. Petit coup d’œil à la ronde, à nous quatre nous sommes dans la moyenne d’age : 25 ans ! Nous avons même le plaisir de retrouver Amélie, Julien, Anae et Meloe, pour le plus grand bonheur des enfants!
Nouvelle fenêtre météo : nous refaisons les sacs et laissons à nouveau vélos et sacoches chez Mariana qui quelques jours plus tôt nous avait gentiment proposé de garder nos affaires chez elle.
Cette fois nous partons pour le passo d’El Viento, le bien nommé… Il y a douze ans, ce fameux vent ne nous avait pas laissé dépasser le rocher à la sortie du campement, le col était alors resté pour nous un endroit impossible à rejoindre. Cette fois nous y croyons. Nous montons d’un bon pas. Petite pause sur les rochers, craque le pantalon. Célestin se marre en voyant ma culotte léopards. Flo sort le gros scotch gris pour que les félins ne s’échappent pas. Établissement du campement à l’abri dans la forêt. La cabane est toujours là, aussi petite que dans notre souvenir, et manifestement les souris aussi ! Nous plongeons dans nos duvets car une grande journée nous attend.
Pour monter au paso del viento deux passages rigolos, le premier : une tyrolienne. L’épreuve précédente ayant été de louer des baudriers ajustables… dès que nous prononcions le mot » enfant « , la réponse était » non « . Même en leur démontrant l’inverse, preuves (légales et pratiques) en direct, c’était » non, les baudriers ne sont pas faits pour les enfants « . Ils auraient tout aussi bien pu nous dire » Non, les enfants ne vont pas en montagne « . Flo était donc retourné en boutique le lendemain, sans enfants. Et le voilà maintenant pendu au câble, sa fille entre les jambes, à passer au-dessus du torrent sous les applaudissements de la petite file des randonneurs. Une fois toute la famille de l’autre côté, nous poursuivons notre ascension pour arriver sur un glacier, suffisamment couvert de cailloux pour ne pas craindre les glissades. Leïla est contente ! Elle jalousait son frère depuis qu’elle savait qu’il avait été sur la Mer de glace avant sa naissance. Elle avait bien regardé la carte et avait repéré que nous allions passer près, voir sur des glaciers : » Maman, regarde, là on peut aller sur le glacier « . Elle enjambe les crevasses sans appréhension et s’amuse avec son frère à jeter des cailloux dans les trous d’eau pour en estimer la profondeur. Nous poursuivons notre montée pour trouver des lacs d’altitude au col et basculer sur le campo de hielo sur, un immense champ de glace alimenté par les précipitations venues du Pacifique. Au fond, d’autres chaînes de montagnes qui semblent loin de toute exploration. C’est magnifique ! Nous restons un long moment devant ce paysage grandiose.
Puis c’est la longue redescente, le glacier, le pierrier et la tyrolienne, en solo pour les enfants cette fois, arrivée au camping et chute d’une dent de Célestin. Il écrit un mot à la petite souris… Au petit déjeuner, c’est au tour de Flo de perdre une dent… Le soir même, il va voir la petite souris du poste de santé, qui lui dit de revenir le lendemain à 7h, heures des urgences. Célestin se tourne vers moi avec un grand sourire « Maman, pour couper le turon, il faut attendre demain 7h… «
La météo nous annonce à nouveau du vent, de la pluie, que du bonheur, hors de question de reprendre la route tout de suite. Nous profitons des accalmies pour aller nous balader aux pieds des falaises. Le camion de Patagonia est de passage dans le village, nous apportons pantalon et veste à ses couturières pour les faire réparer, parfait! Nous faisons même une petite séance ciné-montagne dans la salle d’escalade du club andino. On se sent presque comme à la maison !